Archive pour juillet 2012

10
Juil
12

Boo, le plus chou des chiens

La beauté et la créativité des albums pour enfants raviront toujours Federico. Comme pour mettre en valeur la qualité du travail de beaucoup d’éditeurs, certains d’entre eux semblent faire des concours de mochitude (laideur en patois de la garenne). Federico a ainsi repéré quelques maisons d’éditions ou collections dont les ouvrages ont l’air d’avoir été illustrés sur Paint et écrits par un GPS.

Ceux-là, notre ami lapin les fuit, préférant se concentrer sur les publications d’éditeurs équipés d’esprits créatifs. Comme ceux-ci (si vous avez suivi les articles de Federico avec sérieux, il est inutile de vous rappeler qui sont les éditeurs en question) :

Stoooooop ! Qu’est-ce que c’est que CELA !?

C’est Boo, le plus chou des chiens, création Milan Jeunesse. C’est sorti en mai 2012 et Federico n’a toujours pas compris le sens de cette entreprise éditoriale tout à fait sérieuse.

Pour commencer, Boo est un loulou de Poméranie qui a une grosse tête dans tous les sens du terme : il se présente comme un toutou adorable et trop stylé que tout le monde aime. Pour la leçon d’humilité, nous repasserons. Tout au long (très long) des 85 pages du livre, Boo nous conte sa life et nous parle de toutes les choses qui font remuer sa petite queue. Dans le désordre : dormir, porter des vêtements tendance, bronzer (!?) et être avec son ami Buddy, qui a eu le bon goût de se cacher derrière ses poils. Afin de ne pas passer pour quelqu’un de futile qui s’arrête au physique, Federico n’insistera pas lourdement sur le fait qu’il ne trouve pas ce chien mignon pour deux carottes. Il ne dira pas non plus que, pour lui, Boo tient plus de la peluche pour jet setteuse écervelée que de l’adorable toutou.

Concentrons nous sur le fond, ce qui va être rapide. En effet, le peu de texte présent dans l’ouvrage se contente de décrire des photos pas drôles qui se ressemblent toutes. Pas d’histoire donc, juste des instantanés de la merveilleuse vie de Boo, du style « j’adore me promener » ou « pour mon anniversaire mes amis m’offrent des cadeaux » … Mouiii. Mais le pire est encore à venir.

En voyant ce livre, notre ami lapin a éclaté d’un rire condescendant et a pensé : « mais qui va acheter ça ? »

Eh bien, potentiellement, 4 708 354 personnes. Soit le nombre de personnes qui aiment la page Facebook de Boo. (Du moins, à l’heure où nous publions cet article)

Ça jette un froid.

En se documentant pour les besoins de cet éminent article, Federico a en effet découvert que Boo était une vraie star sur le net et que les éditions Milan ne se faisaient que l’écho de ce phénomène au faciès surdimensionné. En tapant son prénom sur un moteur de recherche, on peut trouver des vidéos de Boo, beaucoup moins drôles que celles de Maru, l’autre coqueluche des internautes. Finalement, le vrai potentiel comique de Boo s’est révélé le jour où le monde a cru qu’il était mort dans une mare au canards. Lol.

J. H. Lee, Gretchen Lemaistre, Boo, le plus chou des chiens, Milan, mai 2012, 85 p.

Et que ceux qui seraient tentés de dire « Muuuais, un blog avec un lapin qui se moque d’un livre avec un chien, c’est un peu l’hôpital qui se moque du chaudron » aillent (re)consulter cet article. On en reparle juste après.

10
Juil
12

D’acier

Dans à peine deux mois, la rentrée littéraire va débouler avec ses centaines de romans. Comme tous les ans, vous allez essayer de vous y retrouver dans tout ce papier. Pour faire un choix parmi les 646 meilleurs romans du monde (à ce qu’il paraît), vous pourrez développer plusieurs tactiques.

La première consiste à attendre sagement le mois de novembre et la saison des prix littéraire. Ainsi, c’est le cœur léger que vous irez acheter le Goncourt de l’année. Sauf si vous préférez le Renaudot ou le Fémina. Après tout, chacun ses goûts.

La deuxième technique est de marcher d’un pas déterminé vers votre libraire favori, en prenant l’air de celui qui est prêt à en découdre, histoire de lui montrer que tout cela ne vous impressionne pas. Arrivé à sa hauteur, assurez vous qu’il ne peut pas s’enfuir et lancez-lui une salve de « Vous avez lu le dernier Olivier Adam ? Et le Guénassia ? Et celui-là, il est bien ? Et lui, vous l’avez lu ? Et le Djian ? ». Mettez la dose. Comme votre dévoué commerçant aura bien entendu lu l’intégralité des ouvrages de cette rentrée, il pourra vous faire un résumé court mais percutant de tous les livres qui envahissent ornent ses rayonnages. Ça risque de prendre un bon moment, mais au moins vous serez fixé.

Sinon, vous pouvez aussi suivre les conseils de votre avisé chroniqueur qui va aujourd’hui vous faire une enthousiaste présentation de Silvia Avallone. Cette jeune auteur sera présente en septembre avec Le Lynx, dont les quelques extraits lus dans la presse laissent présager du meilleur. Mais c’est son premier roman, D’acier, que Federico aimerait vous inciter à lire.

Piombino est une ville italienne posée au bord de la mer, face à l’île d’Elbe. Ici, c’est vaguement la dèche : les hommes se tuent la santé dans la tentaculaire aciérie qui fait vivre la ville tandis que les femmes attendent que leur jeunesse se fane pour enterrer leurs rêves d’ailleurs. Anna et Francesca, 14 ans, irradient ce petit univers de leur insolente beauté. Leur amitié exclusive décuple leur pouvoir de séduction et leur permet de traverser le morne quotidien sans avenir de Piombino.

Grâce à son crayon très affûté, Silvia Avallone a embarqué Federico dans cette ville d’Italie qui ne croit plus à grand chose. Notre ami lapin n’est revenu de ce voyage qu’en achevant sa lecture.

L’auteur ne s’intéresse pas seulement à Anna et Francesca. Sur l’année que couvre son roman (été 2001-été 2002), elle déroule le quotidien de tout leur entourage, livrant ainsi une chronique sociale à la fois crue et généreuse. Le récit des petits hauts et des très bas des habitants de Piombino a passionné Federico : il a eu de la peine quand la vie les amochait, il s’est mis en colère quand l’injustice était trop… injuste, il s’est apaisé quand un espoir faisait son apparition, et ainsi de suite. De quoi vous chambouler durablement un lapin.

D’acier est un roman sincère qui dégage une énergie folle, une lumière crue. Ce livre n’a pas de début ni de fin. C’est un instantané dans la vie de deux adolescentes qui vont grandir sous nos yeux tandis que, quelque part de l’autre côté du monde, deux tours s’effondrent et une nouvelle guerre commence.

Finalement, c’est son auteur qui en parle le mieux.

Silvia Avallone, D’acier, Liana Lévi, avril 2011, 400 p.

02
Juil
12

Faux profil

Un roman de Jérôme Dumoulin

Dans Faux profil on fait la connaissance d’une petite bande d’amis bobos qui ont la particularité de ne jamais s’être rencontrés dans la « vraie vie » et de ne se connaître qu’à travers leur profil sur Livre de Tête (Facebook en VO). Sur le réseau social, ils rivalisent de mots d’esprit et de photographies énigmatiques pour épater la galerie et entretenir des amitiés beaucoup moins superficielles que n’aurais pu l’imaginer notre ami lapin, peu adepte des relations en haut débit.

Dans cette sphère, la star c’est Cyril Molotov. Ce mystérieux personnage distille son élégance de prince russe sous les yeux ébahis de ses « amis », qui l’admirent aveuglément, quand ils n’en tombent pas éperdument amoureux.

Jusqu’au jour où ce fascinant profil finit par éveiller les doutes chez quatre de ses plus proches contacts. Chacun à sa façon se lance sur la piste des indices qui permettront de résoudre l’énigme Cyril Molotv.

Jusqu’à ce stade du roman, Federico n’était pas plus emballé que ça par sa lecture. Tous ces bourgeois branchés qui s’attachent via les gentils petits pixels de leur « mur », cela laissait notre ami lapin bien perplexe. Néanmoins, Faux profil est un livre écrit dans une langue fluide et se lit très facilement. Federico a donc poursuivi sa lecture tout naturellement jusqu’à éprouver de la sympathie pour ces enquêteurs précieux mais pas ridicules, avec régulièrement un petit sourire sur le museau.

La deuxième partie est beaucoup plus captivante : aussi rythmée que surprenante. L’air de rien, l’auteur fait basculer sa chronique des mœurs facebookiennes dans une ambiance de polar informatique. Dès lors, Federico a réellement été tenu en haleine par les investigations des enquêteurs amateurs qui, perpétuellement rattrapés par leur soif de romanesque, s’emballent d’un rien et prennent des risques qui n’ont rien de virtuel.

À défaut de « liker » grave, Federico donne deux carottes pour ce roman à deux vitesses.

Jérôme Dumoulin, Faux profil, Grasset, avril 2012, 312 p.




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